Ce mercredi 2 juin c’était la Journée Internationale des travailleur.euses du sexe, cette partie de la population active, en bonne partie féminine, qui exerce son métier dans des conditions matérielles assez désastreuses, qui est victime de violence et de discriminations, qui est obligée souvent de se cacher, et n’a pas de droits sociaux et économiques au même titre que les autres. Donc oui, travailleur.euses du sexe : parlons-en, car il est temps!
À l’occasion de cette journée, un « Manifeste féministe pro-droits des travailleur.euses du sexe » (https://manifestefeministe.fr/) est sorti, avec une pétition. C’est un texte qui prône la non-discrimination de ces professions de l’ombre, une rétribution financière explicite et visible, des conditions de travail convenables, la dépénalisation des professions du sexe et de leurs client.e.s.
Mais comment être féministe et défendre les professions liées au sexe?
Car il s’agit souvent de l’exploitation la plus honteuse des femmes, qui sont obligées à battre le trottoir car elles n’ont pas de papiers, ou sont toxicomanes, ou ont fait de mauvaises rencontres, ou sont à la rue, dans dans le besoin financier… Une exploitation du corps féminin pleine d’hypocrisie aussi, car le sexe tarifé est considéré sale, honteux, un travail qui ne mérite pas le respect.
Mais, si on regarde de plus près, ce n’est pas le commerce du sexe qui est le problème, c’est sa diabolisation, c’est le fait de le criminaliser, qui, par conséquent, obliges les personnes qui travaillent dans ce domaine à se cacher, s’exposant aux violences et à l’exploitation de la part d’autrui.
Et les travailleuses du sexe ont aussi le droit de proclamer leur féminisme, si c’est le cas. On peut se respecter, respecter son corps et vouloir se faire respecter même si on fait la pute. Au contraire, c’est encore plus important de le mettre en avant.
Car notre société dans son ensemble considère que le corps des femmes n’appartient pas aux femmes, qu’il y a un droit de regard sur ce qu’elles en font. Si elles décident de le commercialiser (on ne vend pas son corps, il nous appartient toujours), si elles osent s’en approprier, l’exploiter pour elles-mêmes, eh bien ça va pas. Soit ce sont des victimes (et c’est vrai dans certains cas), soit ce sont des femmes perverses ou vénales. C’est une démarche qui, peut-être inconsciemment, va contre l’idée très ancrée que les hommes ont droit au sexe, et gratuitement. Se faire payer pour des prestations est abject et rabaissant à la fois pour les prestataires et le client.
Mais non, si c’est fait dans le respect, rien ne rabaisse personne.
Travailleur.euses du sexe : bien plus que des putes…
Et le domaine du travail du sexe est plus vaste de ce qu’on s’imagine à première vue.
Je connais une fille qui est cam-girl professionnelle, elle a 28 ans, et considère son boulot comme un boulot. Elle a un appartement, un compagnon, des amis, des amies, comme tout le monde. Elle préfère être cam-girl plutôt que se casser le dos aux caisses d’un supermarché ou chez de grandes distributeurs. Parmi les choix que la société lui a proposés, peut-être plus limités que les miens, c’était le plus agréable, avec en plus le meilleur rapport conditions de travail-rémunération.
Il existe également en Belgique un service d’accompagnement sexuel pour personnes handicapées où les prestataires fournissent des services sexuels personnalisés et adaptés à la situation du. de la client.e (http://www.aditiwb.be/accompagnement-sexuel/). Comme le soulignent sur leur site, « L’accompagnement sexuel n’est jamais une activité principale exercée à temps plein. Il n’y a pas non plus de reconnaissance officielle de cette fonction. Néanmoins, le comité bioéthique fédéral a émis un avis à ce sujet (https://www.health.belgium.be/fr/avis-ndeg-74-assistance-sexuelle-aux-personnes-handicapees ) et les régions Wallonnes et Bruxelloises réfléchissent à ce qui serait possible comme légitimation ». Parce que oui, aussi les personnes porteuses d’handicap ont une vie sexuelle et ont envie de s’y épanouir.
Parallèlement, des personnes âgées qui désirent toujours être sexuellement actives font appel à des escorts car autrement ce ne serait pas possible, car le sexe chez personnes âgées, surtout si elles sont seules, est encore très tabou.
On peut aussi décider d’explorer sa sexualité, essayer des choses un peu alternatives, et pour cela faire appel à des professionnel.les me semble une décision responsable.
Je pense que la société et l’économie auraient tout à gagner à accueillir les travailleur.euses du sexe en tant que citoyen.ne.s normaux, en arrêtant de les reléguer dans l’ombre, la précarité l’hypocrisie.
Donc oui, en tant que féministe, je soutiens les travailleur.euses du sexe dans leur lutte pour leurs droits à la citoyenneté!
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